1913
L’arpentage des terres fédérales
Le Dominion du Canada, nouvellement indépendant en 1867, a entrepris une série de projets d’arpentage pour délimiter les terres selon les pratiques britanniques. Le programme a donné lieu à des tracés sur les cartes et des bandes de terres dégagées pour y ériger les lignes de relevé. La dépossession des terres par l’entreprise coloniale faisait partie du programme d’édification de la nation du Dominion. Les relevés et les travaux de cartographie géologique ont été effectués aux TNO sans consulter les Dénés ou les Métis sur leur utilisation traditionnelle de ces terres. À partir de 1913, le Dominion a tenté de localiser les terres de réserve promises en vertu du Traité no 8 et de reconnaître les lieux existants des habitations dans les collectivités le long du fleuve Mackenzie. Les efforts déployés n’ont servi à personne, car les pratiques de gestion des terres du Canada étaient inspirées de celles appliquées aux terres agricoles des Prairies. Ces terres de réserve arpentées ont été placées sur des affleurements rocheux, des marécages et des parcelles généralement indésirables. Tant le gouvernement que les Dénés ont rejeté la tentative d’officialiser les ententes sur les terres.
Les conflits liés au projet d’arpentage sont en partie responsables du boycott du traité à Fort Resolution en 1916. Pierre Smallnose Drygeese était là et se souvient de ce qui s’est passé. « Le chef Susie Drygeese et Gus (Card) parlent des terres… Ils commencent à échanger, mais Gus ne veut rien entendre de ce que Susie lui dit, et Susie dit alors à Gus : « Si tu ne veux pas écouter ce que je dis, inutile de discuter comme ça, autant rentrer chez toi », et le vieil homme est parti précipitamment » (Fumoleau, 2004, p. 145).
L’arpentage des terres s’est poursuivi tout le long du fleuve Mackenzie, se concentrant principalement sur l’identification de ressources et le jalonnement de claims. En 1913, trois concessions de pétrole à Norman Wells ont été retirées et vendues à Imperial Oil Limited en 1918. En 1921, le service des relevés topographiques a envoyé Guy Houston Blanchet vers le nord pour y cartographier plus de 300 000 kilomètres carrés de territoire, en grande partie non arpenté, et centré sur le Bras est du Grand lac des Esclaves. On a demandé à M. Blanchet d’étudier un labyrinthe complexe de lacs et de rivières pour lesquels il n’existait que des cartes très rudimentaires. Le gouvernement du Canada voulait ouvrir cette zone à l’exploitation minière et des ressources. Le modèle de règlement des revendications territoriales du sud exigeait des relevés et des traités pour établir les droits d’accès et de contrôle des terres. Les cartes topographiques de M. Blanchet et la mise en place de bouées de navigation le long du Grand lac des Esclaves ont élargi l’accès canadien aux terres traditionnelles des Dénés territoire appelé Denedeh. M. Blanchet a consulté et employé des Dénés compétents pour réaliser ses levés et il se déplaçait souvent comme les Dénés le faisaient, en se fiant à ce que la terre fournissait. Il a conservé les noms dénés pour de nombreux systèmes qu’il a arpentés.
Le désaccord fondamental entre le gouvernement du Canada et les signataires de traités sur le transfert et la propriété des terres a compliqué le règlement des questions de contrôle des cantons, des réserves et des minéraux jusqu’au XXIe siècle.